jeudi 23 février 2012






C’est une journée de manifestations à travers le monde : l’occasion de faire un bilan sur la situation des femmes.



Traditionnellement les groupes et associations de militantes préparent des manifestations, pour fêter les victoires et les acquis, faire entendre leurs revendications, afin d’améliorer la situation des femmes.



La Journée internationale des femmes reste aujourd’hui d’une brûlante actualité. Car tant que l’égalité entre les hommes et les femmes ne sera pas atteinte, nous aurons besoin de la célébrer.




 A quelques jours de la commémoration de cette fameuse Journée Internationale des Femmes,il nous a plu de vous donner ici livraison de l'article qu'une intellectuelle africaine a commis au sujet de la revendication des droits inaliénables de la femme.




La désillusion de la liberté

par Marie-ange Akoa, vendredi 17 février 2012, 22:43 · 

<<Depuis le droit de vote accordé aux femmes camerounaises  en 1946, la possibilité pour les  mariées de sortir du pays sans autorisation de leur conjoint entre autre, nous pensions avoir fait le plus difficile. Cinquante ans après les indépendances, et malgré les combats remportés haut la main, le fondamental persiste et demeure. Les femmes que nous sommes, que nous incarnons ou que nous souhaitons devenir peuvent- elles se prévaloir d’une quelconque liberté d’expression au vu de toutes les pressions qu’elles subissent dans la vie, notamment en matière de procréation ?


Femme noire, femme africaine : icône jadis adulée et célébrée par tant de générations passées, avant-gardartiste dans tous les combats de libération de l’homme Noir, socle de la vie sociale traditionnelle, moteur de son développement et creuset d’une humanité qui s’est toujours transmise, de génération en génération, avec dignité, amour et respect. 


Se pourrait-il donc que tout cela soit considéré comme un non-événement de nos jours ? Que brusquement la chaîne de transmission des valeurs se soit rompue entre l’Ancien et le Nouveau monde, au point où pour tout héritage désormais, la femme africaine ne doit se consoler que du mépris et du déni de la possibilité d’exprimer son ressenti face aux actes qu’elle  subit pour donner la vie ?


Donner la vie est-il finalement devenu un acte dénué de toute la sacralité qu’on lui connaît dans nos sociétés africaines en général et camerounaise  pour la nommer ? Comment rester insensible aux cris d’une jeune mère qui pendant six, huit, voire  neuf mois aura attendu l’arrivée d’un être cher qui vit en elle dès sa conception ? Comment imaginer la rupture subite, soudaine et brutale d’un lien consubstantiel qui existe depuis l’idée de conception de l’enfant qu’on a tant désiré et voulu jusqu’à l’acte de délivrance? Comment expliquer la disparition d’un être humain dans une structure hospitalière à la renommée internationale durant plus de six mois au grand damne d’une cohorte avertie de spécialistes  en tout genre ? Des questions qui pour l’instant n’ont pas encore trouvé de réponses dans la mesure où tant que l’autorité suprême n’a pas frappé du poing sur la table, toutes les méninges sont en standby, en d’autres termes, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles comme le disait si bien Candide…..


Il est néanmoins curieux de se demander où sont passées les emblématiques femmes ministres du pays des grandes réalisations. Si on se penche sur le côté féminin de la chose, sans toutefois vouloir verser dans le féminisme, il y a quand même matière à débattre. 



Là où le bât blesse, et plus grave encore est le fait qu’elles incarnent malheureusement les structures administratives en première ligne dans cette macabre histoire : il s’agit notamment du ministère des affaires sociales, de la promotion de la femme et de la famille et de l’éducation de base pour ne citer que ceux-là ! Finie la recréation, l’heure est au travail. Voici  un cas d’école qui est soumis à votre appréciation et pouvant éventuellement être mentionné dans vos feuilles de route : les droits et libertés fondamentales des filles et femmes mères ou pas.



 Au-delà de vos prérogatives et fonctions administratives, faisant également fi de la législation en vigueur le temps d’une lecture, ne vous sentez vous pas interpellées en tant que femmes et mères ? Où sont passées vos paroles apaisantes et rassurantes que nous vous connaissons dans nos sociétés ?  Chères  ministres et chères mamans…..vous qui incarnez de valeureux symboles de liberté, d’égalité, de paix et surtout de liberté d’expression, que dis-je, de l’expression juste et des mots justes lorsque tout espoir semble perdu, les femmes  vous appellent, les filles vous regardent, vos enfants veulent vous entendre parler, prendre position et œuvrer pour le respect et la dignité des femmes que vous êtes  et ne cessez de célébrer chaque jour.


 N’avons-nous jamais entendu dire que la femme était la mère de l’humanité ? Qui oserait accepter que la sienne soit traînée dans la boue pour avoir eu le courage de  perpétuer cette humanité ? Comprendrons-nous en fin de compte que les femmes ont le droit de s’exprimer et de revendiquer même le  plus banal de leurs droits ? Encore que donner la vie est loin d’être un acte des plus banals.




 A moins que vos profonds silences nous prouvent malheureusement le contraire, ou comme on le dit si bien chez nous, le Cameroun c’est le Cameroun…. Sauras-tu enfin être, Ö cher Cameroun ce berceau non pas seulement pour nos ancêtres mais également pour tes filles, les femmes et tous tes enfants ?



 En toile de fond évidemment, la liberté de revendiquer ses droits est une chose, la liberté d’en user une toute autre chose. 




Malheureusement le poids des traditions et des religions dans nos sociétés ainsi que toutes les formes de dépravations et déperditions que nous imposent certaines pratiques plus ou moins obscures réussissent  malgré les efforts  à nous imposer des conduites au grand mépris de nos libertés individuelles. 



 Combien de bébés retrouve-t-on dans les poubelles de nos villes chaque jour à cause  d’une insuffisance d’éducation en matière de sexualité des parents de plus en plus jeunes ? Le manque criard en structures éducatives et sociales adéquates pouvant accueillir nos enfants, nos filles et nos sœurs  qui sont dans le refus, l’incapacité ou le déni de maternité d’une part et celles qui  sont dans l’espoir, sinon  caressent  le rêve de devenir mère se réaliser d’autre part ?




 Comment penser une société  juste en matière de droits des femmes en ce qui concerne la procréation ? Une femme  capable de donner la vie dans nos sociétés  est-elle  femme au même titre que celle qui n’a ni les moyens, ni les prédispositions ?
L’idée d’une nouvelle discussion sur  les fondamentaux en matière de droits et liberté des femmes sur la procréation devrait être mis sur la table.




 Si la thèse du vol s’avérait confirmée, la justice devrait s’appliquer comme nous le savons tous…Par ailleurs le plus important réside à notre humble avis sur les origines et les causes de l’acte. Qu’est-ce qui pousserait une femme  apparemment dotée de tous ses sens  à en arriver là ? Plusieurs hypothèses nous viennent à l’esprit  à savoir par exemple son incapacité à porter un bébé, c’est-à-dire à concevoir pour x ou y raisons. On peut notamment évoquer plusieurs aspects tels des raisons médicales (maladie grave), malformation congénitale, infertilité, stérilité etc….ou simplement parce que la conception n’aura jamais fonctionné malheureusement. Deuxième hypothèse et la plus forte pour nous réside sur le regard que notre société porte sur toutes ces femmes qui se retrouvent dans ladite situation. Sont-elles encore capables de marcher tête haute au vu de toutes les interminables pressions familiales, amicales, et de la société en général ? Regardons autour de nous et osons lever le tabou. Combien de femmes ont vu leur couple s’effondrer parce que dame nature n’aura pas été clémente envers elles en matière de procréation ? Combien ont été traitées de sorcières, de « mangeuses d’enfants », de maudites, de vampires, d’avoir passé leur temps à interrompre les grossesses, la liste est longue….





Le cas d’école classique est résumé par la chanson jadis célèbre « Agatha » de Francis Bebey. Dans cette chanson Agatha, femme noire africaine, mariée à un noir africain également, accouche d’un enfant « blanc », au grand damne du village qui l’accuse d’adultère.  Pourtant l’histoire et la science modernes viennent aujourd’hui au secours d’Agatha, car désormais on sait que des couples  peuvent donner naissance à des enfants  suite à une mutation de gènes. 




 Oser lever le tabou, c’est aussi réhabiliter la mémoire d’Agatha tout en considérant l’évolution et les mutations du monde dans lequel nous vivons.


 Enfin, parlons-en de temps en temps, messieurs  et  admettons que nombreux sont ceux  qui parmi vous ne sont pas toujours prêts à sécréter de belles doses de spermatozoïdes, de la mauvaise qualité, ou encore un mauvais transport de ces derniers….êtes-vous pour autant  sous pression et rejetés par la société ?  De nombreux arrangements sont établis dans nos familles à propos. 




Les droits de la femme restent fébriles dans nos sociétés, puissent les femmes un jour  être reconnues en priorité  en tant qu’être humain et mère si possibilité il y a en second lieu ; D’autre part, la législation en matière d’encadrement de la jeune fille et d’accompagnement des femmes en difficulté de procréation et d’adoption, est impérative et devrait être à portée de tous. Cela suppose également l’arbitrage de l’Etat  dans l’organisation de cette forme de liberté d’avoir la possibilité d’être mère sans forcément donner la vie biologiquement parlant...Etre femme dans notre société est-il synonyme d’être mère biologique ?



 Notre culture ne nous laisse-t-elle pas entendre que « la mère n’est pas essentiellement génitrice, mais également et 
surtout éducatrice ? ». Ou alors, devrions nous penser comme John Stuart Mill  qu’ « on a eu tort d’apprendre aux femmes autre chose qu’à bien remplir leur rôle d’odalisque et de servante ? ». 



Il est temps que nous redéfinissions, repensions nos libertés et nos droits pour le bonheur de toutes les filles que nous naissons, femmes que nous devenons, épouses que nous méritons, mères que nous arrachons et êtres humains libres que nous défendons et réclamons.
 Encore de belles années de lutte et de combat devant nous mes chères dames ! >>




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