Camerounaises, Camerounais,
Mes chers compatriotes,
Nous voici au seuil de la première étape de notre « longue marche » vers l’émergence.
La récente élection présidentielle en a établi des bases solides. Vous
avez fait le choix de la stabilité et de la paix, apportant ainsi la
preuve de votre intelligence de la situation et de votre sens des
responsabilités. Quoi que certains aient pu en dire, ce scrutin a été
honnête et a traduit la volonté de la majorité de notre peuple, lequel –
je le souligne – n’a pas suivi les appels à protester dans la rue. Je
saisis cette occasion pour réaffirmer que les dysfonctionnements qui ont
été constatés et qui, de toute façon, n’étaient pas de nature à
remettre en cause les résultats de la consultation, seront corrigés
avant les prochaines échéances électorales.
Ainsi que je m’y suis engagé, la période qui s’ouvre sera
essentiellement consacrée à la relance de la croissance. D’ailleurs,
nous n’avons pas le choix. Ou nous avançons, et tous les espoirs nous
sont permis. Ou nous faisons du sur-place, et nos problèmes ne feront
que s’aggraver. Il faut savoir en effet qu’à l’image de la plupart des
pays africains, nous sommes entraînés dans une course poursuite entre
notre développement et notre démographie. C’est pour en sortir
vainqueurs que nous devons absolument mettre en œuvre la « nouvelle
dynamique » que je vous ai proposée pendant la campagne électorale.
Que nous a-t-il manqué jusqu’à présent pour parvenir à stimuler notre économie ?
Je pense que, dans le passé, l’action gouvernementale a souffert d’un
déficit d’esprit d’entreprise et que l’administration a péché par
immobilisme. Nous devons venir à bout de cette inertie qui nous a fait
tant de mal.
Autre ennemi sournois et redoutable, la corruption. Elle est non
seulement coupable de prélever une part importante de la fortune
publique, mais également responsable du retard dans la réalisation des
projets indispensables au redressement économique de notre pays. J’ai
dit à plusieurs reprises que nous continuerons sans relâche le combat
contre ce fléau. La création du Tribunal Criminel Spécial, dont on peut
attendre une accélération des procédures en cours et, on peut l’espérer,
le reversement des sommes détournées, illustre notre détermination en
la matière.
Au nombre des difficultés que nous avons rencontrées et que nous
rencontrons encore pour relancer la croissance, je dois, pour ne pas
être injuste, mentionner celles qui tiennent au contexte international.
Sans revenir en détail sur l’inégalité des termes de l’échange, les
contraintes de l’ajustement structurel et les conséquences de la
dernière crise économique et financière, je crois pouvoir dire, sans
travestir la vérité, que les excès de la dérégulation, les désordres
provoqués par la spéculation et le ralentissement de l’aide publique au
développement n’ont pas facilité la tâche des pays comme le nôtre.
Il n’est pas question ici de chercher des excuses pour nos performances
insuffisantes mais simplement de rappeler les faits. Si l’on peut, à bon
droit, se déclarer déçu des effets de la mondialisation, il est
également permis de s’inquiéter de la lenteur des progrès des
négociations qui se poursuivent au sein d’instances comme le G8, le G20
et l’OMC, négociations dont le but avoué était de mettre de l’ordre dans
l’économie et la finance mondiales, de rendre plus équitable le
commerce international et de garantir une plus grande solidarité entre
le Nord et le Sud. Or, on le voit, les problèmes du monde occidental, et
en particulier celui des dettes souveraines, ont pris le pas sur ceux
des pays en développement.
Il en ressort que nous devrons de plus en plus compter sur nos propres
efforts, nous inspirer de l’expérience des pays émergents. Pour cela, je
crois que nous devrions faire de la relance une véritable cause
nationale. Tous les acteurs de notre économie devraient se mobiliser,
avec l’aide des pouvoirs publics, pour que leurs efforts convergent vers
un seul et unique objectif : faire décoller le Cameroun, comme l’ont
fait il y a une trentaine d’années les nouveaux « dragons » asiatiques.
Ce « patriotisme » économique pourrait rassembler toutes les forces
vives du pays. En disant cela, je pense en particulier aux femmes
camerounaises dont le dynamisme est unanimement reconnu mais aussi aux
jeunes générations qui ont du mal, en dépit de leurs compétences, à se
hisser aux postes de responsabilité.
Pour réaliser ce grand dessein, nous ne sommes pas sans atouts.
Nous avons désormais une feuille de route, le Document de Stratégie pour
la Croissance et l’Emploi, qui fixe les objectifs pour la décennie en
cours et le cadre dans lequel s’insère notre programmation budgétaire.
Celle-ci reposera en 2012 sur la poursuite de l’amélioration de la
gestion des finances publiques, notamment par un recouvrement judicieux
des recettes budgétaires et un progrès de la qualité de la dépense.
L’accroissement des investissements sera favorisé par des mesures
fiscales et douanières incitatives. Dans le même esprit, le budget
d’investissement public pour 2012 a été sensiblement augmenté. Il sera
affecté en priorité à deux grands secteurs : les infrastructures et les
filières de production. Parmi d’autres, ces dispositions traduisent la
volonté de l’Etat d’agir énergiquement pour accélérer la relance de
notre économie.
Je n’aurai pas, je
crois, à m’étendre sur le chapitre de nos richesses naturelles. Elles
sont connues de tous. Je me bornerai à rappeler les principales :
- Une agriculture disposant de vastes espaces disponibles et de
conditions climatiques favorables. On se souviendra que j’ai exposé à
Ebolowa les grandes lignes de la « révolution agricole » qu’il faudra à
tout prix lancer au cours de ce septennat.
- Des ressources minières, notamment fer, bauxite, cobalt, dont l’exploitation est prévue.
- Des ressources énergétiques, hydroélectricité, pétrole, gaz qui sont en cours d’exploitation ou en projet.
Je n’aurai garde d’omettre nos ressources humaines, nombreuses,
laborieuses, bien formées, qui devraient trouver à s’employer avec la
mise en œuvre de nos grands projets et l’accélération de la
professionnalisation de l’enseignement.
Ces atouts suffiront-ils pour mener à bien notre grand dessein ? La question mérite d’être posée.
Il nous faudra en effet, pour tirer parti de ces facteurs favorables,
remettre en cause les comportements qui sont à l’origine de nos
déficiences ou de nos échecs. Au premier rang d’entre eux, la recherche
du profit personnel au détriment de l’intérêt général, lequel devrait
pourtant être la règle d’or du service public. Le Contrôle de l’Etat
devra se montrer inflexible à ce sujet. De même, les mauvaises habitudes
telles que le népotisme, le trafic d’influence, la fraude qui se sont
largement répandus, devront disparaître.
Par ailleurs, nous ne devrons pas nous dissimuler que « la nouvelle
dynamique » que nous voulons impulser exigera des services de l’Etat,
mais aussi de la société civile, des efforts et un dévouement
considérables. C’est de cette forme de patriotisme dont j’ai parlé plus
haut, car il ne s’agit rien moins que de sortir le Cameroun de la
catégorie des pays en développement pour le hisser au niveau des
nouveaux pays émergents. Sachons que c’est là une entreprise de longue
haleine qui prendra du temps et de la persévérance.
Nous devrons aussi compter avec l’évolution de l’économie mondiale sur
laquelle planent pour le moment de lourdes incertitudes… Dans un tel
climat, nous n’avons pas d’autre choix que d’accélérer la mise en valeur
de nos ressources en lançant dès que possible nos grands projets. Pour
les financer, outre la participation de notre budget d’investissement
public, nous aurons recours à l’épargne nationale, c’est-à-dire à
l’emprunt, aux bailleurs de fonds, internationaux ou autres, et aux pays
amis.
Je ne reviendrai pas en détail sur les grands projets que j’ai
longuement évoqués devant l’Assemblée Nationale lors de ma prestation de
serment et qui sont repris dans le programme du nouveau Gouvernement.
Je compte sur celui-ci – que je considère comme un « gouvernement de
mission » – pour consacrer toute son énergie et ses compétences à la
réalisation de ces projets. J’y veillerai personnellement.
Mes chers compatriotes,
Je suis bien conscient que les efforts que je vous demande pour soutenir
notre dessein commun ne doivent pas aller sans contrepartie. Il est
temps pour vous en effet de recueillir les fruits des sacrifices que
vous avez consentis.
Si, comme je le pense, nous réussissons à relancer vigoureusement notre
activité économique, la situation de l’emploi devrait sensiblement se
détendre. Les couches sociales les plus touchées par le chômage, les
jeunes notamment, pourraient accéder à la vie professionnelle et voir
leur sort s’améliorer. Nous ferons tout pour qu’il en soit ainsi.
L’Etat, d’autre part, continuera à ouvrir la fonction publique dans la
mesure de ses moyens.
Mon autre priorité, vous le savez, est d’améliorer les conditions de vie
de notre population qui ne sont pas toujours dignes d’un pays comme le
nôtre. La relance de la croissance devrait nous donner sur ce plan des
marges de manœuvres plus importantes. Qu’il s’agisse de la santé, de
l’éducation, du logement, de la sécurité sociale, de l’accès à
l’électricité, à l’eau potable, soyez sûrs que les engagements que j’ai
pris seront tenus dans toute la mesure du possible.
Camerounaises, Camerounais,
Mes chers compatriotes,
Voilà, résumés, les termes du contrat qu’investi de votre confiance,
j’ai passé avec vous le 03 novembre devant l’Assemblée Nationale. Nous
nous sommes ainsi engagés à faire ensemble du Cameroun une République
exemplaire, une Nation respectée à l’extérieur, un Etat juste qui assure
l’égalité des chances, un pays où la richesse nationale sera
équitablement répartie.
Ce défi est sans doute un des plus importants auquel nous ayons eu à
faire face depuis l’introduction de la démocratie dans notre pays. Le
moment est maintenant venu de décider si nous voulons jeter toutes nos
forces dans la bataille pour relancer notre économie et apporter des
conditions de vie convenables à la majorité de notre peuple.
Pour ma part, j’ai la conviction qu’ensemble nous pouvons y parvenir.
Si, comme je le pense, je peux compter sur vous comme vous pouvez
compter sur moi, je ne doute pas que nous arrivions à nos fins.
Avant de conclure, je voudrais dire que le Cinquantenaire de notre
Réunification, intervenue, comme vous le savez, le 1er octobre 1961,
sera célébré avec toute la solennité nécessaire. Seule la concomitance
de la date de l’anniversaire de cet événement historique avec celle de
l’élection présidentielle nous a empêchés de le commémorer au moment où
nous l’aurions souhaité. Il le sera dès que possible, à Buéa, avec toute
la dignité et la ferveur voulues, car nous ne devons jamais oublier que
la Réunification fut le premier pas de notre Nation vers son unité.
Mes chers compatriotes,
Laissez-moi maintenant vous présenter, à toutes et à tous, mes vœux les
plus sincères de santé et de bonheur, pour la Nouvelle Année.
Bonne et heureuse Année 2012.
Vive le Cameroun !
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